Dans la fosse, l'orchestre fait tout ses efforts pour avoir de la partition la lecture historique la plus rigoureuse, parfois à l'excès. On va éplucher tous les anciens traités, témoignages, retrouver instruments, cordes en boyaux et autres, pour tendre à une authenticité maximale. Louable, même si quelque fois on va un peu trop loin et remplace la musicalité par l'histoire pointilleuse.
Mais le cocasse c'est que, sur la scène, on fait exactement le contraire : le metteur en scène, depuis quelques décennies, c'est celui qui s'efforce par tous moyens de déformer l'opéra en le modernisant de façon aberrante : concours de délire, compétition dans le n'importe quoi.
Ou alors (est-ce mieux ?) on nous dicte toujours la "lecture convenable" de l'œuvre comme si nous étions des crétins absolus ; des uniformes SS dans Fidelio, au cas où on n'aurait pas compris qu'il s'agit de La Violence Du Pouvoir ; au cas où l’on aurait oublié que le Ventre est Toujours Fécond…
Heureusement, il y a le disque. Ouf !
Cf. Ph. Beaussant : La Malscène. Opuscule qui dit des évidences (c'est très rare). On est même gêné que de telles évidences aient à être dites, et qu'elles passent pour originalité, voire pour perversion suspecte. Seul défaut du livre : il a pris le parti de ne pas nommer les productions auxquelles il pense, pour donner un tour plus général à son propos. Mais justement, il faudrait nommer. Si un Académicien Français ne le fait pas, qui le fera ? On n'ose dire des noms que dans le huis-clos d'un appartement, après avoir vérifié qu'il n'y ait pas de micros cachés ?