samedi 1 juin 2024

Le disque et le concert

Infinie supériorité du disque sur le concert. On peut choisir son moment, sa posture. Se faire son programme. On peut se concentrer, se recueillir. Utiliser un casque à réducteur de bruit (s'approcher de la musique intérieure, telle que devait l'éprouver Beethoven). Pas de problème de parking ou de tram. Pas d'agitation sociale, pas de malencontreuse rencontre qui oblige à parler des banalités et des bassesses du quotidien, donc à se dévier de son but ; pas de brouhaha, pas de phrases bêtes ou ineptes entendues malgré soi. Pas de présentateur oiseux (pléonasme). Pas de snobs qui viennent se montrer. Pas de voisins qui papotent pendant la cavatine du XIII° quatuor. Pas de toux. Pas de téléphone qui se rue en contrepoint du morceau. Pas de situation aberrante par rapport à l'axe du son. Pas d'applaudissements (pavloviens). Incidemment, pas de paumes douloureuses. Pas de cris de joie avant même la fin du dernier accord. Pas de bis obligé, ni d'encore standardisé. Possibilité de méditer, de digérer, d'approfondir ce qu'on vient d'entendre – ce qu'on vient d'entendre, et qu'on a eu quelque chance, selon le mot de Claudel, de "devenir" : la musique.