[poème écrit à 17 ans]
Ballade des äusseren Lebens
Und Kinder wachsen auf mit tiefen Augen,
Die von nichts wissen, wachsen auf und sterben,
Und alle Menschen gehen ihre Wege.
Und süsse Früchte werden aus den herben
Und fallen nachts wie tote Vögel nieder
Und liegen wenig Tage und verderben.
Und immer weht der Wind, und immer wieder
Vernehmen wir und reden viele Worte
Und spüren Lust und Müdigkeit der Glieder.
Und Strassen laufen durch das Gras, und Orte
Sind da und dort, voll Fackeln, Baümen, Teichen,
Und drohende, und totenhaft verdorrte...
Wozu sind diese aufgebaut ? und gleichen
Einander nie ? und sind unzählig viele ?
Was wechselt Lachen, Weinen und Erbleichen ?
Was frommt das alles uns und diese Spiele,
Die wir doch gross und ewig einsam sind
Und wandernd nimmer suchen irgend Ziele ?
Was frommts, dergleichen viel gesehen haben ?
Und dennoch sagt der viel, der 'Abend' sagt,
Ein Wort, daraus Tiefsinn und Trauer rinnt
Wie schwerer Honig aus den hohlen Waben.
Ballade de la vie extérieure
Et poussent les enfants, aux yeux profonds ;
Ignorant tout, poussent vers la poussière,
Et les hommes toujours leur chemin font.
Et les fruits doux viennent des fleurs amères,
Et puis tombent, la nuit, en oiseaux morts,
Et après quelques jours, fondent en terre.
Et le vent fait ses tours, et sans remords,
On entend et on dit mainte parole ;
Joie et fatigue alternent dans nos corps.
Et courent les chemins dans l'herbe folle,
Vers des villages secs et menaçants,
Aux lacs mortels, aux sombres fumerolles...
A quoi bon les bâtir tous différents
Les uns des autres, et pourquoi si nombreux ?
Où vont pâleurs, sanglots, rires et chants ?
Que nous fait tout cela, à nous - et tous ces jeux -
Qui sommes grands et toujours seuls au fond,
Errant sans but où diriger nos yeux ?
A quoi bon les remplir, ces yeux avides ?
Il en dit long, celui qui dit "le soir",
Mot qui répand le deuil, le sens profond,
Comme le miel s'enfuit du rayon vide.
En annexe, la page de Zweig sur ce que représenta le "miracle" H v H pour sa génération :
Zweig (Stefan) : Le Monde d'Hier (traduction Jean-Paul Zimmermann) p. 73 :
« Toujours un seul homme qui, dans quelque domaine que ce soit, a atteint d'un premier élan à ce qui était réputé inaccessible, enhardit, par la seule réalité de son succès, toute la jeunesse qui vit autour de lui et après lui. En ce sens-là, Hofmannsthal et Rilke représentaient pour nous un extraordinaire excitant de nos énergies. Sans espérer que l'un d'entre nous pût jamais répéter le miracle de Hofmannsthal, nous étions tous affermis par le seul fait de son existence matérielle. Elle démontrait à nos yeux que, dans notre temps, dans notre ville, dans notre milieu, le poète était possible. [...] L'homme de génie avait grandi dans une maison semblable à la nôtre, entre des meubles pareils, élevé selon les principes de la morale de notre classe sociale, il était entré dans un lycée aussi stérile que le nôtre, avait étudié dans les mêmes manuels, s'était assis pendant huit ans sur les mêmes bancs de bois [...] Et voici qu'il avait réussi [...] à surmonter l'espace et son étroitesse, sa ville et sa famille, par cet essor dans l'illimité. Hofmannsthal nous démontrait en quelque sorte ad oculos qu'il était possible en principe de créer de la poésie et de la poésie parfaite dans notre temps et même dans l'atmosphère de geôle d'un lycée autrichien. »
3 commentaires:
Je croyais que rien ne pouvait égaler une tasse d’Earl Grey avec du lait de soja et du miel…
It's a brand new day…
Merci.
Mellis, melos : en grec, c'est presque le même mot pour le miel et la mélodie... Orphée et le miel...
HvH, comme Pindare, avait reçu sur la lèvre une goutte de miel.
Signe de reconnaissance des “hard- working artists »...
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