Dans Le Don de Nabokov, chap. 1 se trouve enchâssée l’histoire de Iacha, le fils suicidé (Pléiade II, p. 49-55). Or il semble qu’il y a au moins deux sources à cette histoire, et que ces deux sources sont germaniques.
1. l’étrange amour en trio ressemble passablement au trio, très étrange lui aussi, constitué par Nietzsche, Paul Rée et Lou Andreas Salomé.
2. la communion amoureuse dans la mort est quant à elle un décalque et une amplification du suicide de Kleist : puisque le corps fait obstacle à la communion des âmes, il faut supprimer le corps, donc se suicider, pour fusionner. Chez Kleist, à deux ; chez Nabokov (toujours plus fort) à trois. Et le lieu de ce suicide (Grunewald) est proche de celui de Kleist (Wannsee).
Cela ne change pas la vision qu’on peut avoir du roman, mais cela suggère des influences germaniques que Nabokov a toujours relativisées.
P.S. : La rencontre (assez évidente) entre Mademoiselle O de Nabokov et Die Marquise von O… de Kleist a été étudiée par Hal H. Rennert : "Literary Revenge: Nabokov's 'Mademoiselle O' and Kleist's 'Die Marquise von O" (Germano-Slavica, 4, No. 6 [1984]