mercredi 23 mars 2011

Flaubert : des incipits et leur rythme



  Flaubert propose souvent des incipits "circonflexes", simples ou composés : 

Bovary : 
« Nous étions à l'étude / quand le proviseur entra. »
6 + 7 
1° membre féminin, 2° masculin
montée et point d'orgue sur TUD', 
et lourde retombée sur le TRA.
(+ annonce on ne peut plus emblématique des rapports entre l'imparfait et le passé simple : ce pourrait être un exemple de grammaire)

Salammbô : 
« C’était à Mégara, faubourg de Carthage   6 + 5
dans les jardins d'Hamilcar."  4 + 3
(11 + 7)
 Même schéma, mais l'ascendant et le descendant sont répartis chacun en deux groupes, la pointe du circonflexe du "Age".
Quant à la saturation en "A", Claudel en a dit tout le mal possible. 

Bouvard : 
« Comme il faisait  / une chaleur 8 (4+4)
de trente-trois degrés, 6 (4 + 2)
(8+ 6 = 14)

le boulevard / Bourdon  6 (4 +2)
était / absolument / désert. »  8 (2+6 +2)
(6 + 8 = 14)
Ici, les compositions sont un peu plus complexes ; la pointe est sur "grÉs".
"Bouvard" déjà trouve son écho dans "boulevard" ; la chaleur nous "bourdonne" dans les oreilles ; et on entend déjà presque les "bourdes" des deux bonshommes. Quant au "désert", c'est  dans son acception intellectuelle qu'ils finiront.

... en passant : 

"Yonville", la ville de la banalité, de la routine, des prépensés de Homais : on-ville ? 
  


Beethoven à 3 temps, à 1 temps

  
  
    
  On a dit que la façon de battre la mesure dans le premier mouvement de l'Héroïque était liée à des raisons idéologiques. À un temps, on a un phrasé plus léger, fluide, dansant ; à trois temps, plus analytique, puissant, pesant, monumental... voire monumentaliste... ce qui correspondrait dangereusement à l'idéologie nazie... Voire. 

  Je proposerais plutôt ceci : 
à 3 temps, ce serait "à l'allemande" ; 
à 1 temps, "à l'autrichienne". 
  ... pas à cause de la valse, c'est une autre histoire ; je songe plutôt à cette anecdote entendue jadis : 
  Des militaires autrichiens ne parviennent pas à désembourber une pièce d'artillerie. "Une, deux, trois, hop !" et rien ne se passe. Des militaires allemands les regardent narquois, et s'entendent dire : "si vous êtes si malins, désembourbez-le !". Les militaires allemands s'y mettent : "Une, deux, trois ! et hop !... c'est désembourbé". Alors, l'officier autrichien : "Ah, bien sûr, si vous utilisez la force... "