Affichage des articles dont le libellé est poésie personnelle. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est poésie personnelle. Afficher tous les articles

dimanche 12 juillet 2020

Sonnet (cris d'enfants)



.. autre pastiche de Rilke...

Wie ergreift uns der Vogelschrei... (Rilke)

Même dans leurs jeux, même dans leurs rires,
les cris des enfants sont les cris d'effroi
de leur être qui toujours se déchire,
égarement infini dans l'étroit.

Pour tenter de couvrir le hurlement
de la douleur en eux, constante crise,
ils vocifèrent et ils martyrisent
le blanc silence infatigablement. 

Parfois, pourtant, un cri est le beau fruit
de la douceur qui jase et qui s'augmente,
en ravissement de son bel état,

murmure de la joie qui monte au bruit
suraigu : l'être en ivresse s'y chante,
grenade extasiée en tous ses éclats.


mardi 30 juin 2020

Sonnet



[pastiche à base de Rilke, avec des ingrédients valéryens et proustiens]

Imperceptible en notre sein demeure
le berceau qui nous parle tendrement.
Ne cherchons pas : l'ange vient à son heure
nous rappeler à ce doux mouvement.

De notre cœur écoutons la patience :
laissons-le battre au fond de nous sans nous
jusqu'au moment de frêle renaissance
où notre adulte soudain se dénoue.

Une silencieuse bénédiction
restitue la première oscillation
par un simple ondoiement que rien ne guide.

L'ample vendange de notre savoir
s'évanouit devant l'infime espoir -
balancement léger du panier vide.


vendredi 26 juin 2020

Zanahoria [Cantique de la carotte cosmique]



Longtemps, je baignai dans Lorca. D’où, inévitablement, un pastiche, comportant des morceaux de Jimenez (Desvelo), des souvenirs de Mallarmé (Cantique de saint Jean), des échos de Rilke (Sonnets à Orphée I, XIII), et, probablement, des maladresses d’espagnol (passim). 
[auto-traduction à la suite du ‘poème’]


Zanahoria

Desde el principio de los Tiempos,
cada madrugada,
un cocinero divino 
nos regala del sol ardiente,
cortando fina rodaja
de tu esplendorosa sustancia,
zanahoria eterna.

Pero, mientras que estás subiendo,
refulgente, y cayendo,
otro secreto cocinero, 
en cielo contrario,
corta cuidadosamente fina rodaja 
de pepino pálido.

¡ Ay, Zanahoria, luz de oro !
¡ Ay, Pepino, dulzura de plata !

Rodaja de zanahoria es el cuello de San Juan,
descabezado en en cielo,
haciendo el día más largo del año,
cayendo y rebotando.

Tu zumo vale el de la manzana,
tan cantada - demasiado -
por los que vean 
la fruta sólo en la fruta
la luz sólo en la luz,
la poesía sólo en las florecillas.

Sea como el niño
que oye tu nombre maravilloso,
y gusta tu zumo azucarado.

¡ Ay Zanahoria !

Miguel de Filipón y Tábano



Carotte

Depuis le commencement des Temps,
chaque matin,
un cuisinier divin
nous offre le soleil ardent,
coupant une fine rondelle
de ta splendide substance, 
carotte éternelle. 

Mais pendant que tu montes,
resplendissante, et que tu tombes,
un autre cuisinier secret,
dans un ciel contraire, 
coupe soigneusement une fine rondelle
de concombre pâle. 

Ah ! Carotte, lumière d’or !
Ah ! Concombre, douceur d’argent !

La rondelle de carotte est le cou de saint Jean,
décapité dans le ciel,
faisant le jour le plus long de l’année,
tombant et rebondissant.

Ton jus vaut celui de la pomme,
si chantée - trop -
par ceux qui voient
le fruit seulement dans le fruit,
la lumière seulement dans la lumière,
et la poésie que dans les fleurettes.

soyez comme l’enfant
qui entend ton nom merveilleux,
et goût ton jus sucré.

Ah ! Carotte !


jeudi 25 juin 2020

Mon 'Orphée'


Les années passées à lire et étudier Valéry ne pouvaient pas ne pas déboucher sur un pastiche… 


Aux lignes de ma lyre, un temple se désigne 
Où les pierres du lieu dans l'ordre se font signe.
De ce frémissement sur le sol projeté
Surgit du dieu pensif la haute volupté.

Sonnez dans le midi, prêtresses de l'absence,
Griffez l'azur du temps d'une immobile danse,
Flûtes qui vous fuyez sans cesse bellement !
Bâtissez le chœur pur où finit le tourment !

Soit mon silence d'or illustré en colonnes,
Prière de mes doigts, poème qui rayonnes,
Lyre tendue et vide, âme dès ici-bas,

Mesure qui des Muses a marqué chaque pas.
Ma lèvre close au soir peut oublier son chant,
O marbres qui videz la querelle du temps !


Pour mémoire, l’Orphée de Valéry : 

... Je compose en esprit, sous les myrtes, Orphée
L’Admirable !... le feu, des cirques purs descend ;
Il change le mont chauve en auguste trophée
D’où s’exhale d’un dieu l’acte retentissant.

Si le dieu chante, il rompt le site tout-puissant ;
Le soleil voit l’horreur du mouvement des pierres ; 
Une plainte inouïe appelle éblouissants
Les hauts murs d’or harmonieux d’un sanctuaire.

Il chante, assis au bord du ciel splendide, Orphée !
Le roc marche, et trébuche ; et chaque pierre fée
Se sent un poids nouveau qui vers l’azur délire !

D’un Temple à demi nu le soir baigne l’essor,
Et soi-même il s’assemble et s’ordonne dans l’or
À l’âme immense du grand hymne sur la lyre !


samedi 20 juin 2020

Sonnet de la boule Quiès



[Dans une autre vie, je fus si plongé dans les Sonnets à Orphée que je ne pus m’empêcher de pasticher Rilke. Une source sonore méconnue me sembla digne de figurer parmi les figures orphiques.]


O, boule Quiès ! paupière pour l'oreille,
habilement glissée dans le conduit
qui mène à ton profond ; le simple bruit
de ton souffle te revient en merveille.

Les machines, les cris, les bavardages
sont éloignés dans un étouffement
doux et neigeux qui difficilement
traverse pourtant le tendre barrage.

Orphée sommeille au creux de ton silence,
il accorde sa lyre à ta rumeur
d'où purement s'élève une cadence.

Sois un nid d'éclosion et ne te presse ; 
retrouve en toi la musique d'un cœur ;
et dans la pulsation, entends : Qui est-ce ?


mardi 16 juin 2020

Sonnet du Blaireau




[Dans une autre vie, je fus si plongé dans les Sonnets à Orphée que je ne pus m’empêcher de pasticher Rilke. Un noble animal me semblait digne de figurer parmi les figures orphiques]


Calme bête aux passages multiples,
tu connais les morts, les très-puissants,
tu nous enseignes le grand périple
qui nous ramène vers les vivants.

Tu vas et viens, telle est ton essence,
toi qui ne cesses de te nourrir
de l'air, du sol que tu sais chérir,
maître des trépas et des naissances.

Avisé tu ne quittes l'obscur
de ton terrier qu'à la pleine nuit,
et tu lui offres un chant très pur.

Ton ami, dans cette ombre sans feinte,
pacifique t'approche sans bruit :
tu le guides dans tes labyrinthes.