Dans Féerie II, Pléiade p. 469, Céline revendique la grande précision et importance de son témoignage (!) ; il était sur place ; il a payé très cher. Il se réclame de Pline, qui "fait toujours autorité"
"faut observer les phénomènes d'une attention plus que sérieuse, surtout quand ils sont « cataclystes » ! qu'on se permette pas de vous contester, dix !... douze siècles plus tard !... personne conteste Pline l'Ancien ! il fait toujours autorité !... il en sera de même pour mézigue vers l'an 53-54... 3 000 !... il a payé ses « phénomènes » Pline l'Ancien !... moi aussi j'ai payé un peu..."
Après "3 000" on trouve en Pléiade une note vraiment étrange ; l'immense connaisseur qui fait l'annotation avoue sa perplexité devant cette mention : "La succession de ces deux dates n'est pas parfaitement claire. 1953-1954 sont les années où Céline met au point Féerie II."
Alors que le sens est très clair : ce que Pline a fait il y a dix, douze siècles est encore une référence aujourd'hui. Ce que je fais sera encore une référence dans onze siècles, soit en 3053-3054. Si l'on écrit le sous-entendu (si évident qu'on répugne à le mentionner) :
"il en sera de même pour mézigue vers l'an 53-54... 3 000 ! [attention, je veux dire les années 53-54 des années 3 000 !]."
Autrement dit, "je ne fais pas du journalisme". Céline va ici dans le sens de Gide disant "J'appelle journalisme tout ce qui aura moins de valeur demain qu'aujourd'hui". Céline veut, comme il le dit sans cesse dans ses romans d'après-guerre, écrire pour la postérité, pour l'histoire, ære perennius...