a Juan Ramón Jiménez
Era una noche del mes
de mayo, azul y serena.
Sobre el agudo ciprés
brillaba la luna llena,
iluminando la fuente
en donde el agua surtía
sollozando intermitente.
Sólo la fuente se oía.
Después, se escuchó el acento
de un oculto ruiseñor.
Quebró una racha de viento
la curva del surtidor.
Y una dulce melodía
vagó por todo el jardín :
entre los mirtos tañía
un músico su violín.
Era un acorde lamento
de juventud y de amor
para la luna y el viento,
el agua y el ruiseñor.
«El jardín tiene una fuente
y la fuente una quimera…».
Cantaba una voz doliente,
alma de la primavera.
Calló la voz y el violín
apagó su melodía.
Quedó la melancolía
vagando por el jardín.
Sólo la fuente se oía.
Ce poème a tout pour n'être pas rendu, comme je l'aimerais, en rimes et en rythme : mètre bref, mots simples et insubstituables, pas d'effets, pas de contorsions ; donc marge quasi nulle. J'ai essayé, mais seulement "tant bien que mal", de rendre un peu de rythme, un peu de rime.
Mieux vaut lire l'original, certes encore assez peu caractéristique du style ultérieur de Machado, qui a fait sa gloire. Tendre, sensuel, serein, musical, un peu alangui, ce Machado de 1903-1904 est plus proche de Fauré que de Falla…
à Juan Ramón Jiménez
C'était une nuit de mai
une nuit bleue et sereine.
À la pointe du cyprès
brillait la lune pleine,
illuminant la fontaine
d'où jaillissait l'eau,
intermittent sanglot.
On n'entendait que la fontaine.
Puis on entendit l'accent
d'un rossignol caché.
Et se brisa d'un coup de vent
le jet d'eau incurvé.
Et sur tout le jardin
erra un tendre son :
dans les myrtes un musicien
faisait résonner son violon.
C'était un triste accord
fait de jeunesse et d'amour
pour la lune et pour le vent
pour l'eau et pour le rossignol.
"Le jardin a une fontaine
et la fontaine une chimère…"
Une voix chantait sa peine,
âme du printemps.
La voix se tut et le violon
éteignit sa mélodie.
Il ne resta que la peine
errant sur le jardin.
On n'entendait que la fontaine.